Et pourquoi, demanderez-vous fort judicieusement, Esa-Pekka Salonen a-t-il intitulé son mouvement de quatuor de 2007 Homunculus ? L’explication ne manque pas d’un brin de cocasserie ; on sait que la théorie « spermiste » de la fin du Moyen-Âge, formulée entre autres par Paracelse, mais encore en vogue jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, affirmait que le spermatozoïde était, d’emblée, un « petit homme » entièrement formé, et qu’il ne lui restait plus qu’à grandir dans la matrice maternelle. D’où le titre « petit homme » pour ce morceau qui, bien que court, contient une somme assez impressionnante de matière musicale. Curieusement pour ce compositeur dont on connaissait les penchants les plus avant-gardistes, cet ouvrage ne fuit pas les pôles de tonalité, les échanges harmoniques en tout genre, sans doute en avait-il assez des excès de ladite avant-garde… Le Kamus Quartet poursuit avec le Premier Quatuor « Métamorphoses nocturnes » de Ligeti, écrit en 1954 dans un langage qui ne refuse aucunement la filiation avec les derniers quatuors de Bartók, même si son langage dépasse en verdeur et en violence ce que Bartók pouvait avoir imaginé. Enfin, l’album se referme avec le très beau (et si rarement joué) Troisième et dernier Quatuor de Britten, écrit entre Aldeburgh et Venise en 1975 alors qu’il se savait déjà malade et condamné. Il ne fut d’ailleurs créé que deux semaines après sa disparition ; le langage poignant, soigneusement distillé de son style et son écriture antérieure, est un véritable testament et « résumé » du dernier Britten. Le Kamus Quartet, fondé à Helsinki voici une quinzaine d’années, explore volontiers les répertoires du XXe et du XXIe siècle, ainsi que la musique nordique dans son acception la plus large – jusqu’aux Pays Baltes donc. © SM/Qobuz