Pour Marwa, jeune native de Colmar d’origine marocaine, tout est allé très vite. Après une enfance studieuse, elle lâche les cours pour tenter sa chance dans la jungle du music biz. « C’est la musique qui m’a fait quitter l’école », lâche celle qui fut fan de Diam’s avant de se lancer dans la chanson. L’amour de la musique l’amène à enregistrer une reprise de « Bella », le fameux hit de Maitre Gims, dans un microscopique studio de Strasbourg. Un coup d’essai, mais surtout l’occasion de se rendre compte qu’elle a ce que tant d’autres de ses consœurs n’ont pas : une vraie voix, avec un grain unique. Pour Marwa, l’aventure commence.
Cette passionnée de son fait le voyage à Bruxelles en 2014 pour enregistrer son premier titre original, « Ce Soir », alors qu’elle n’a que 17 ans. Funky et frais, le morceau fait son petit effet. Mais c’est avec « Temps Perdu » qu’elle lance réellement sa carrière. Ça n’était pas gagné : « Au départ je ne savais pas comment procéder. Je mettais un temps fou à écrire mes textes. J’avais pris rendez-vous au studio chez les Belges et je devais me dépêcher pour écrire, mais c’était le trou noir. Au final, j’ai écrit la totalité du morceau dans le train pour Bruxelles ».
La rencontre décisive dans la carrière de Marwa est Youssef, alias Lartiste. « Il a écouté mes sons et il m’a proposé de venir le voir à son label, Purple Money. Mon tempérament et ma manière d’être l’ont séduit ». Marwa signe donc chez PMP et se met au travail. Avant d’enregistrer son album, elle rencontre Double X, un duo de producteurs venu de Livry-Gargan au CV déjà bien chargé (Lartiste, Niska, Lacrim, SCH, Damso, etc), qui va gérer la plus grande partie de ses prods. Les deux beatmakers trouvent leur vitesse de croisière avec la chanteuse, qui travaille à l’instinct. « On a enregistré la nuit, jamais le jour. En plus j’éteignais la lumière dans la cabine, je baissais même la luminosité de mon portable. Ça me stresse quand on me regarde, alors dans le noir je peux m’exprimer comme je veux ».
Même si Marwa a multiplié les millions de vues avec ses premières chansons club lâchées sur youtube, elle décide de donner à plusieurs morceaux de son premier album une couleur mélancolique. « On m’a connu avec des sons festifs mais ce disque est autobiographique. Ma vie est chouette sauf que comme tout le monde, je suis passée par des moments tristes. Et j’avais aussi besoin de chanter ça ». Que les amateurs de bangers se rassurent, Marwa n’a pas oublié d’inclure quelques morceaux calibrés dancefloor comme « Mehdi », single d’une rare efficacité boosté par la prod de Double X, qui s’est surpassé. Entre les producteurs et la jeune chanteuse, le courant passe. Même si elle est timide au point d’avoir hésité à monter sur scène, Marwa fini par vaincre ses peurs. C’est en avril 2017 qu’elle se confronte au public pour la première fois, dans un bar à chicha parisien blindé, face à 300 personnes. « J’étais stressée en arrivant mais dès que j’ai commencé à chanter, mon trac s’est évaporé ».
Elle s’était juré de ne pas avoir de featuring sur son album, mais le destin en a décidé autrement : « J’ai demandé à Jul de venir chanter avec moi quand je finissais mon album. Il a été OK, et il m’a demandé que je sois dans le sien ». Le rappeur marseillais favori de Marwa a donc posé sa voix sur « À La Base », un des titres forts de l’album.
« Attillo » raconte l’histoire d’une trahison intime. « Je me suis inspiré de la série Gomorrah, que j’aime beaucoup. J’ai écrit un texte sur le son de SCH et quand j’ai demandé à Lartiste une prod dans ce délire, il m’a dit que lui aussi avait un son inspiré du feuilleton. C’est une chanson très dark, je pense qu’elle va toucher les mecs ».
« Je veux taffer, il n’y a que ça qui me fait kiffer », affirme Marwa dans « Fâché », un de ses titres les plus personnels. Des nappes sombres de claviers sur un beat au ralenti, un texte très personnel qui évoque des souvenirs parfois douloureux. Marwa est comme ça, cash. Elle ne triche pas sur ses sentiments, n’hésite pas à imposer ses choix. Pas besoin de styliste ou de mentor, la Colmarienne sait ce qu’elle veut, elle sait qui elle est : une chanteuse populaire avec la gouaille d’une Edith Piaf du ghetto. Une jeune chanteuse qui aime sa famille, la musique et le sportswear. Pour Marwa, la famille est au cœur de sa musique, avec ses sœurs que l’on voit à ses côtés dans ses vidéos. « J’ai 20 ans, je ne suis pas la star typique en mode strass et paillettes. Et je n’ai pas peur de la concurrence ou de ne plus exister demain », affirme-t-elle de sa chaude voix feutrée au timbre reconnaissable entre mille.
Son nom d’artiste : Loud comme l’adjectif anglais signifiant fort, puissant.
Marwa Loud. La puissance et le charme, avec le bon son en bonus.
Olivier Cachin