Lorsque les trois quatuors « Rasumovsky » de Beethoven commencèrent à circuler auprès des grands amateurs en 1806, ils suscitèrent une certaine incompréhension, pour rester correct. Un discours complexe, déviant radicalement de tout ce qui s’était fait alors, sans parler de l’écriture de cordes qui devait sembler bien difficile aux instrumentistes y compris les plus chevronnés. De nos jours, ces ouvrages font bien sûr partie du grand répertoire, et leur opacité semble s’être levée depuis un bon bout de temps. Par contraste, le Quatuor No. 10 de Chostakovitch, écrit en 1964, s’éloigne sérieusement du ton tragique et violent de bien des ouvrages antérieurs – hormis le scherzo, assez anguleux quand même. Le compositeur y semble apaisé, presque enjoué par moments, un véritable enjouement et non pas les grimaces d’un clown soumis à la torture… Le Quatuor Armida, vainqueur du prestigieux Concours de l’ARD cuvée 2012 (ainsi accessoirement que du Prix du public et de six autres distinctions lors du même concours) et Premier prix du concours de Genève de l’année précédente, a souhaité se perfectionner auprès de Reinhard Goebel qui lui a apporté une vision assez nouvelle de la tenue d’archet, des attaques, de la conception des phrases, qui fait de ses interprétations – que ce soit pour Beethoven ou Chostakovitch – de grands moments de vivacité et de coloris instrumentaux. © SM/Qobuz