Une trentaine de pièces, notées sur un précieux manuscrit du début du XIVe siècle – le Roman de Fauvel¬ –, voilà l’unique source que l’on connaît actuellement pour les pièces composées par Jehan de Lescurel (dates inconnues ; il fut actif entre la fin du XIIIe et le début du XIVe siècle, et la légende selon laquelle il aurait été pendu en 1303 pour débauche semble des plus infondées). Ce sont des chants monophoniques – sauf un, polyphonique – dont il convient donc d’improviser l’accompagnement, mais mélodies et textes sont bel et bien notés dans le manuscrit en question, une rareté à cette époque. Lescurel se situe, historiquement, entre la fin de l’ère des trouvères et le début de l’Ars Nova (que l’on place entre le Roman de Fauvel et la mort de Machaut en 1377) ; cette source est donc pour nous un très précieux enseignement sur ce qu’a pu être l’art des derniers trouvères méridionaux. L’ensemble Céladon nous offre la tout première intégrale de l’intégralité de l’œuvre connu de Lescurel, dans une lecture à la fois très vivante, respectueuse de ce que l’on pense savoir de l’époque, et « libre » de par le fait que certaines monophonies ont été agrémentées par Céladon de contrepoints – car l’on peut imaginer que l’unique exemplaire à trois voix dans le manuscrit de Fauvel était non pas une exception mais un modèle permettant de développer les autres mélodies de la même manière. Théorie très tentante, et dont la démonstration est réalisée avec éclat par l’ensemble. Enregistré en septembre 2015 à l’église Notre-Dame de Centeilles (Hérault), un petit bijou du XIIIe siècle construit sur une base encore plus ancienne du Xe siècle, avec la sonorité que l’on imagine. © SM/Qobuz