The Shin Sekaï

The Shin Sekaï

French rap band

* En anglais uniquement

Avec le label Wati B, le rap est entré dans une nouvelle phase. Avec le groupe The Shin Sekaï, Wati B prépare le futur. Deux amis, deux talents, un son. Dadju et Abou Tall se connaissent depuis 2009, ils ont 22 ans et déjà une solide culture musicale. C’est en 2012 qu’ils lancent The Shin Sekaï, comprendre « le Nouveau Monde », en référence à leur manga préféré, One Piece. Abou Tall a grandi dans le 9ème arrondissement de Paris, dans la même rue que Barack Adama de la Sexion D’Assaut. « Moi je suis le petit frère de Maître Gims » explique Dadju, « la connexion s’est faite naturellement, on était déjà dans le Wati B avant d’y être ! » Il faudrait pourtant être naïf pour croire à du copinage. Dadju : « Nous, on est des compétiteurs. On n’aime pas se la couler douce, on doit prouver aux gens qu’on mérite d’être là. On veut être numéro un, faire du son très lourd. C’est la politique de Wati B : être au top, faire de grandes choses ». Après des débuts prometteurs en 2012 et un EP remarqué titré Volume I, Shin Sekaï développe son concept. On les voit en première partie de la Sexion D’Assaut sur leur grosse tournée, on les entend en feat avec Maska (« Loin Des Ennuis »), Black M (« Rappelle-toi ») et sur l’album de Maître Gims (« Ça Marche »). Mais le but de Shin Sekaï est de mettre en valeur ses qualités propres. Et de ne pas être réduits à une caricature. « En fait on ne se définit pas comme des chanteurs ni comme des rappeurs mais comme des artistes. On ne veut pas être limités. On essaie de se diversifier ». La conception de Volume II, suite logique de leur premier EP, démarre en mai 2013. Pas de vacances pour le Shin Sekaï, qui s’enferme en studio tout l’été pour enregistrer les 13 titres composant ce second opus. Dadju explique la méthode Shin Sekaï : « On côtoie beaucoup de beatmakers/musiciens. Comme Renaud, qui a fait “Désolé” et “J’Me Tire”. Il a beaucoup travaillé sur notre disque. On a les mélodies dans la tête, on les mémorise dans notre téléphone et on appelle Renaud : “J’ai une mélodie, qu’est-ce qu’on pourrait faire de ça ?” Et on part de cette base pour en faire un gros son ». Abou Tall précise : « On a des idées pour les accords et la musique. On travaille pour arriver au plus proche de ce qu’on veut tous les deux ». Après des semaines de travail acharné, la structure de l’album émerge. Une collection de chansons qui vont du rap au funk en passant par une large variété de styles. Le single « Rêver » est illuminé par une mélodie qui fait penser à du Goldman. Dadju n’a d’ailleurs pas peur d’affirmer l’éclectisme de Shin Sekaï : « La variété française, que ça soit dans les paroles ou les mélodies, c’est très beau. C’est même repris par les Américains. C’est quelque chose de très fort. Je peux apprécier un son de variété autant qu’un son de Jay-Z ou Eminem ». « J’ai Mes Torts » flirte avec le reggae et « Du Berceau Au Linceul » fonce dans le funk façon années 1980. Dadju : « On était à l’île de la Réunion et j’étais dans ma période funk, j’en écoutais souvent. On s’est dit pourquoi ne pas en faire un, comme on aime toucher à tout ? La mélodie est venue en premier, j’ai appelé Renaud, Tall a amené sa touche. Il n’y a pas de sample, c’est une compo de A à Z, Renaud joue la guitare, il est aussi musicien ». Dans « Mens-moi », Shin Sekaï fait une référence au classique du hip-hop « Demain C’Est Loin ». Abou Tall : « On a fait un festival avec IAM. Ça m’a fait plaisir de les voir en live, de les voir en vrai aussi, c’est des gens humbles. Ils rappent depuis avant ma naissance ! On n’hésite pas à faire ce genre de petit clin d’œil ». « Nous Sommes Demain » a une vibe à la Corneille, « Oublie-moi » lorgne du côté des années 1990. Dans « Où Aller », le duo évoque ses craintes face au succès (« J’ai peur de troquer mon âme contre une vie d’artiste »). « Ça peut vite monter à la tête. Ça arrive souvent des gens qui délaissent leurs principes, leur famille, leurs amis pour se concentrer sur cette vie d’artiste. Je ne suis qu’un homme, j’ai peur de ça, je reste fidèle à mes principes jusqu’à maintenant et j’espère ne pas changer » résume Dadju. Les paroles de l’« Intro » confirment que Shin Sekaï connaît sa valeur rapologique : « J’ai jamais rêvé d’être un grand rappeur, à vrai dire ces conneries ne rentrent pas dans mes mœurs. Donc je suis vraiment désolé d’être meilleur que vous tous sans ne jamais avoir bicrave ou vu une cellule de l’intérieur ». En douceur, sans racaillerie surjouée, sans clasher personne sauf ceux qui se reconnaitront. Juste du flow, des mots, du gros son et une basse qui fracasse. Est-ce « le début d’un règne », comme le déclare le morceau « Nouvelle Ere » ? Ça y ressemble. Le final de l’album, « Dis-leur », avec son refrain en lingala, apporte une touche africaine à ce Volume II d’une étonnante maturité pour un groupe si jeune. La suite ? La tournée pour courant 2014 et un album qui a déjà un titre, Indéfini, comme prochain projet. Les nouveaux soldats du Wati B ne risquent pas de manquer de munitions. The Shin Sekaï, c’est bien le Nouveau Monde du rap en français. Olivier Cachin