Il convient vraiment de fermer les yeux sur le fait que le compositeur Gordon Getty est l’héritier des milliards de et de la puissance de l’empire Getty, pour se concentrer sur Gordon Getty l’excellent compositeur. Né en 1933, il a à son actif quatre œuvres scéniques (opéras ou cantates), nombre d’ouvrages pour chœur – son plus grand répertoire, en vérité –, de la musique pour piano et quatre œuvres symphoniques. Getty est toujours resté à l’écart de l’avant-garde qui a sévi – surtout en Europe, il est vrai – au cours des années 1970, pour maintenir un langage aux confins de la tonalité qui n’est pas sans présenter quelques parallèles avec Chostakovitch, Hindemith et encore plus Britten. Voici en première mondiale discographique son dernier opéra, The Canterville Ghost d’après la nouvelle éponyme d’Oscar Wilde (en français, « Le Fantôme de Canterville »), créé en 2015 à l’Opéra de Leipzig et dont voici l’enregistrement avec l’équipe d’origine. Il s’agit d’un ouvrage en un acte (à Leipzig, il servait de « première partie » avant I Pagiacci de Leoncavallo. L’héritage de Britten semble des plus clairs, même si l’on peut aussi déceler une certaine influence de Menotti dans le traitement de la continuité et les assises harmoniques. Quoi qu’il en soit, voilà un ouvrage que l’on aimerait entendre aussi en France – il a déjà été programmé à San Francisco et Los Angeles, ce qui n’est pas rien. L’humour et le fantastique se mêlent avec bonheur dans le livret – il est question d’une famille américaine résolument pragmatique, guère impressionnée par le fantôme d’un lord assassin qui hante leur vénérable château anglais nouvellement acquis, au point que le fantôme se laisse charmer par la fille des nouveaux propriétaires et accepte finalement de partir reposer en paix. Absolutely delicious. © SM/Qobuz